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Retrouvez toute l'information économique et financière sur notre application Orishas Direct à Télécharger sur Play StoreTRANSPARENCE Les milliards d’avoirs régularisés ces dernières années en Suisse peuvent laisser penser
que l’argent au noir reste une pratique répandue. L’arsenal répressif s’est renforcé, sans toutefois avoir
comblé toutes les zones grises
EMMANUEL GARESSUS , ZURICH ET SÉBASTIEN RUCHE @garessus et t @sebruche
Dans le seul canton de Zurich, près de 10 milliards de francs d’argent non déclaré ont été régularisés au
cours des dix dernières années, rapportait début janvier la presse alémanique. A Zurich comme dans le reste
du pays, le nombre de déclarations spontanées a explosé ces dernières années, souvent avant l’entrée en
vigueur de l’échange automatique d’informations fiscales. Est-il toujours possible de dissimuler des avoirs en
Suisse? L’étau se resserre, mais sans complètement annihiler des zones grises qui font qu’il n’est pas
toujours possible de savoir si un actif est déclaré ou pas.
Le risque fiscal a muté. Après le virage que représente l’échange automatique de renseignements (EAR)
pour la place financière suisse, «la problématique de la conformité fiscale s’est déplacée vers d’autres
canaux, secteurs et pays. Les banques suisses font très généralement leur travail dans l’ouverture des
comptes, le suivi et les mesures contre le blanchiment», indique Sergio Uldry, associé auprès de GWP, à
Genève.
Depuis 2018, la Suisse échange des informations avec d’autres pays concernant les comptes détenus par
des étrangers. Cet échange automatique d’informations, mis en place au niveau mondial sous l’égide de
l’OCDE, est pratiqué par 100 juridictions. Les banques suisses sont désormais tenues de connaître le statut
fiscal des avoirs détenus par leurs clients.
Déplacement vers l’art ou la bijouterie
Les personnes fortunées qui ont leur argent dans les banques en Suisse «sont parfois considérées par un
certain public comme les profiteurs du système, mais cette image est en décalage avec les réalités fiscales.
Les menaces liées au blanchiment fiscal existeront toujours pour un intermédiaire financier, mais ces
menaces sont bien mieux comprises aujourd’hui, et leurs impacts sont soigneusement évalués dans le cadre
d’une saine gestion des risques», poursuit Sergio Uldry.
Les processus financiers et de lutte contre le blanchiment des banques de la place respectent entièrement
les normes internationales, s’ils ne les dépassent pas. «D’autres pratiques sont devenues plus incertaines,
notamment en rapport avec des actifs de nature non financière. Les fortunes potentiellement mal acquises
pourraient trouver parfois refuge dans des instruments tels que le marché de l’art ou du luxe», ajoutet-il. En
précisant que l’infraction de blanchiment – on l’oublie souvent – ce n’est pas que pour les banques, mais
aussi pour les marchands d’art, d’horlogerie, de bijoux, de voitures et d’immobilier.
Les coffres-forts ont dans le passé été visés par le Groupe d’action financière (GAFI), l’organisme chargé de
la lutte contre le blanchiment, après l’émergence d’officines spécialisées. Dans la pratique, la location d’un
coffre bancaire nécessite toujours la détention d’un compte auprès de l’établissement en question, de telle
sorte que la connaissance du client est acquise dans tous les cas. Dans des secteurs non financiers, comme
l’art, par exemple, les transactions douteuses laissent toujours des traces, mais l’identité de l’acheteur ou du
vendeur n’est pas aisée à établir en cas de recours à des intermédiaires ou si les transactions passent par
des sociétés offshore, indique Sergio Uldry.
En matière de lutte contre le blanchiment, à partir du 1er janvier 2021, le seuil à partir duquel les négociants
en métaux précieux et pierres précieuses doivent appliquer les obligations de diligence prévues par la loi
(LBA) aux paiements en espèces est abaissé de 100 000 à 15 000 francs, pour suivre les recommandations
du GAFI. «La Suisse suit la tendance générale dans l’UE à restreindre les opérations en espèces, mais avec
une intensité bien moindre que dans l’UE», conclut Sergio Uldry. Reste que si on respecte les obligations de
diligence, les paiements en espèces de plus de 100 000 francs ne sont pas totalement interdits en Suisse. En
France, les plafonds varient mais sont souvent plus bas. En Italie, le plafond général est abaissé en 2020 à
2000 euros.
L’échange automatique (EAR) ne s’applique pas aux résidents suisses (les détails de leurs comptes
bancaires ne sont pas transmis aux fiscs cantonaux ni à l’administration fiscale fédérale). En conséquence,
personne ne peut exactement savoir si ces avoirs sont déclarés. D’autant plus que la déclaration se fait a
posteriori (en début d’année concernant l’année précédente).
Les comptes numérotés «n’ont toujours jamais existé»
Grand classique des films d’espionnage, les comptes numérotés «n’ont toujours jamais existé», relève un
fiscaliste romand qui préfère s’exprimer sous le couvert de l’anonymat: «La plupart des banques n’en ouvrent
plus, sauf bonne raison, comme la volonté d’augmenter la confidentialité au sein de la banque qui abrite le
compte.»
Par exemple lorsque le patron de la banque ne souhaite pas que ses employés sachent exactement combien
il possède. «Mais l’identité du client est toujours connue par un petit nombre de cadres de la banque»,
précise notre source. Pour le quidam, ce n’est donc pas un moyen très facile de frauder.
Et si le canton de résidence du client organise une amnistie fiscale? Ce pourrait être un signe que le client
veut se régulariser. Mais là encore, difficile de l’établir avec certitude: «S’il demande ses relevés fiscaux, c’est
le signe qu’il pourrait les utiliser pour bénéficier de l’amnistie, mais on n’est pas sûr tant qu’on n’a pas de
preuve de l’administration fiscale», note ce fiscaliste.
Pour les détenteurs étrangers de comptes en Suisse, plusieurs cas de figure sont envisageables. Si le
détenteur est un étranger domicilié dans un pays ayant conclu un accord d’échange automatique avec la
Suisse, ses avoirs seront trouvés. Mais si son pays n’échange pas automatiquement de données avec
Berne, là encore, impossible d’être certain qu’il déclare ses avoirs.
Néanmoins, certains indices peuvent donner des indications: ce client se fait-il envoyer son courrier bancaire
dans son pays d’origine? Demande-t-il un relevé fiscal? Demande-t-il éventuellement à récupérer l’impôt
anticipé qui aurait frappé ses placements? L’argent déposé en Suisse provient du pays d’origine du client?
Celui-ci effectue-t-il des versements vers son pays d’origine? A-t-il fourni une attestation de conformité fiscale
signée par un spécialiste de son pays?
Autre configuration: un client étranger détenant un compte suisse à travers une structure, comme un trust,
une fondation ou une société panaméenne. Si le pays où est située la structure a conclu un accord d’EAR
avec la Suisse, la structure est considérée comme transparente sur le plan fiscal. Dans ce cas, la banque qui
accueille le compte effectue le reporting fiscal.
Le paradoxe des paradis fiscaux
Il se peut aussi que cette structure se définisse comme une entité d’investissement gérée de manière
professionnelle, ce qui lui permet de transmettre elle-même les données de ses comptes. Dans ce cas, la
banque suisse ne peut pas vérifier que les avoirs sont déclarés. Sauf si des contribuables américains sont
impliqués. Les accords FATCA obligent les intermédiaires financiers du monde entier à déclarer les avoirs de
leurs clients américains. Ce dispositif permet lui aussi à des sociétés d’effectuer le reporting. Elles doivent
pour cela être enregistrées auprès du fisc américain et figurer dans un registre public. Une banque suisse
pourra vérifier qu’une structure qui fait le reporting elle-même est toujours inscrite dans ce registre.
Les ayants droit économiques n’apparaissent pas dans des registres publics, en revanche. Il est donc
théoriquement possible qu’une structure panaméenne – par exemple – soit créée par un contribuable
européen, qui en serait l’ayant droit économique et qui siégerait au conseil d’administration. Autrement dit,
qui aurait tous les pouvoirs. Cette structure pourrait se considérer comme une entité d’investissement
professionnelle et assurer faire elle-même le reporting fiscal.
De manière générale, nous précise un fiscaliste, si une telle structure provient d’un pays de l’OCDE, elle
attirera moins la suspicion que si elle est basée dans une juridiction plus exotique. Qu’en est-il des paradis
fiscaux, justement? Pour eux, la situation est paradoxale.
La Suisse et l’Union européenne ont choisi de signer des accords d’échange automatique avec un maximum
de juridictions considérées comme des paradis fiscaux, sur l’idée qu’ils étaient plus susceptibles d’accueillir des fonds non déclarés. Mais en pratique, cela entraîne que les sociétés de ces juridictions ne sont pas
considérées comme transparentes sur le plan fiscal. Et donc qu’elles peuvent effectuer elles-mêmes le
reporting fiscal. Alors qu’en l’absence d’accord d’EAR avec la Suisse, par exemple, la transmission
d’informations aurait été faite par les banques suisses accueillant les comptes.
Les circuits mafieux
«Le problème fiscal consiste à renforcer non pas les réglementations mais plutôt la mise en œuvre de la loi.
En dehors du système bancaire, il y a assez peu de poursuites et de vérification de l’arrière-plan
économique, par exemple dans les transactions de particulier à particulier. La vérification est en effet
compliquée», révèle Sandrine Giroud, associée auprès de Lalive, à Genève. Les zones à risques concernent
l’art, le luxe et les antiquités. «C’est donc une question de priorité de politique criminelle et de budget»,
résume la fiscaliste. Dans le financement du terrorisme et des organisations mafieuses, «les soupçons
pèsent beaucoup sur les ventes de meubles ou d’art sur les sites internet, soit des transactions de quelques
milliers de francs, qui ne sont pas analysées par les autorités. Les opérations passent aussi parfois par les
cryptomonnaies, ce qui justifie la prudence des banques dans ce domaine», avance-t-elle.
«Les menaces liées au blanchiment fiscal existeront toujours pour un intermédiaire financier»
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